Regarde les Chinois : Jason Lu

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Cette semaine, dans le cadre de Regarde les Chinois, nous rencontrons Jason Lu, 26 ans, co-propriétaire du restaurant Lu Mama. Samedi dernier, je me suis rendu sur l’heure du midi à son restaurant, rue Ste-Catherine dans le « Chinatown II » à l’ouest de Concordia, et nous avons discuté à bâtons rompus de son restaurant … Continue reading “Regarde les Chinois : Jason Lu”

Jason Lu

Cette semaine, dans le cadre de Regarde les Chinois, nous rencontrons Jason Lu, 26 ans, co-propriétaire du restaurant Lu Mama. Samedi dernier, je me suis rendu sur l’heure du midi à son restaurant, rue Ste-Catherine dans le « Chinatown II » à l’ouest de Concordia, et nous avons discuté à bâtons rompus de son restaurant (et d’autres restaurants), de religion, de bouffe chinoise, grandir à Montréal.

This week, for Regarde les Chinois, we meet with Jason Lu, 26, co-owner of Restaurant Lu Mama. Last Saturday, on lunch hour, I went to his restaurant on Ste-Catherine in “Chinatown II”, west of Concordia, and we talked about his restaurant (and other ones), religion, Chinese food, growing up in Montreal.

Language of the interview / langue de l’interview: French / français

***

Comme les Chinois: Comment t’as commencé le resto ?

Jason Lu: Nous autres, on a nommé le restaurant « Lu Mama » et la raison était tout simplement que « Lu » est notre nom de famille, et « Mama » voulait tout simplement dire maman. Puis, c’est plus facile pour les gens à se rappeler. On a eu des problèmes pour l’enregistrement au Québec, parce qu’au Québec, ça prend un nom de restaurant en français, et « mama”, ça se disait pas en français! Alors, il a fallu qu’on prenne « Lu Maman », mais dans les faits (NDLR: sur les affiches, la pub), on a pu changer ça à « Restaurant Lu Mama », parce que « restaurant”, c’est français. Mais comme nom de compagnie, ça on a pas le droit.

CLC : C’est intéressant !

Après avoir choisi le nom, l’idée c’était qu’on voulait que les personnes viennent et notre mère – le stéréotype voulant que la mère cuisine, et le père transporte des choses lourdes (fait des gestes avec ses bras) – et que la mère cuisine bien. On voulait donner un feel très familial, que la bouffe sera bonne. Un de nos chefs disaient que dans le monde, il y avait deux sortes de docteurs: un que tu vas voir à l’hôpital, et l’autre c’est le chef. Le docteur à l’hôpital, il prend soin de toi tu sois malade, tandis que le chef, il prend soin de toi avant que tu deviennes malade! Et il y a beaucoup de pensées que le chef nous a donné, comme travailler, c’est pas juste ouvrir un restaurant. Il disait toujours que si la nourriture est bonne, long terme, on va rester là. Mais si la bouffe est pas bonne, même que si c’est quelque chose de pas cher, on resterait pas bien longtemps. Quand on observe de l’extérieur, on voit que c’est comme une maison, avec les fenêtres, garage, porte.

CLC : Ouais, ben j’essaie de penser, pis j’étais déjà venu ici avant, quand c’était (le restaurant coréen Arirang). Il y a une vraie différence. Ça, par exemple (en pointant la lampe), vous l’avez acheté chez Ikea ?

Ça oui, on l’a acheté chez Ikea!

CLC : Ouais, j’en ai plein chez nous des comme ça!

Ah ouais!? Moi et mon frère, on a vu ça avant d’ouvrir le restaurant, et la raison était qu’on voulait que les gens rentrent dans le resto, ait leur intimité, espace privé, sans être le seul dans le restaurant. Le concept initial est que dans certains restaurants, il y a des chandelles – qu’on a remplacé par ça, parce que les chandelles, on trouvait pas ça très pratique sur une table. Les gens les changent de place, les éteignent. Mais les lumières, peu de gens vont déplacer ça.

CLC : Alors, tu me disais que tu as ouvert ce restaurant avec ton frère ?

Moi et mon frère aîné, et les membres de notre famille, ma mère, mon père, ma belle-soeur, ma blonde aussi. On est venu discuter du restaurant en janvier 200 …

CLC : 2006 ?

Non, 2007! On a débuté en janvier 2007.

CLC : Ah ouais, 2007! Le temps passe vite et ça fait même pas un an – j’ai l’impression que t’es là depuis toujours!

Puis, on a fait des rénovations pendant deux mois durant l’été. Alors, tout ce que vous voyez (montre les tables, planchers), à part les ustensiles, c’est fait à la main! Comme ça, le plancher, au début, c’était bleu, puis ça nous a pris quatre jours avec mon frère, et quelques amis (NDLR: maintenant du bois plaqué). Puis les tables…

CLC : Vous avez acheté des tables.

Non, on a fait les tables!

CLC : Vous avez fait les tables ?

On est allé au Réno, puis on acheté les tables coupées!

CLC : (Un peu incrédule) C’est une blague ça ?!

Non, non! (Me montre le ruban gommé sur le pourtour des tables) Vous voyez ces deux rangées de ruban : c’est parce que le tape de cette largeur, ça existe pas!

CLC : C’est facile ?

Non, mais on a eu l’inspiration à bâtir le restaurant de nos mains. Les tables étaient en pierre, les murs, le plafond étaient d’une autre couleur. Ça nous a pris deux mois pour tout refaire. Et aussi dans la cuisine. Donc on a ouvert originalement, en mars.

CLC : Ouais, à ce moment-là, je suis passé devant deux, trois fois avant de rentrer, et j’ai vu le menu « Fusion Asiatique » et c’est quelque chose du genre à m’éteindre (turns me off). C’est au moment qu’on m’a dit qu’il y avait des plats taiwanais, que je suis allé essayer. Mais j’étais un peu déçu après l’été, quand vous avez rajouté le sushi. Pourquoi avez-vous donc choisi de rajouter le sushi bar à votre menu?

Le menu qu’on avait auparavant était 70% ciblé à un marché sinophone. Si je ne connais pas Taiwan, peu importe le prix, je ne vais pas nécessairement essayer. On a fait une recherche de marché, juste par le nombre de clients par jour, gars/filles, on a remarqué que c’était plus asiatique, et que ça comptait que pour 8% de la population à Montréal. Avec le 8% c’est bon au début. Lorsqu’on a ouvert en mars, on a vu que les ventes étaient bonnes. Mais rendu mai, juin, on voit que ça descend. On le sait, c’est normal : quand quelque chose est nouveau, les gens vont essayer. […] La façon qu’on fait maintenant, en ajoutant le japonais, on est maintenant fusion japonais/taiwanais. Pourquoi pas taiwanais/japonais à la place? C’est parce que le premier donne l’image de ce que le restaurant représente.

En juillet, on a rajouté le sushi. Si les gens veulent essayer du taiwanais, il verront qu’il y a aussi du japonais. Si je suis quelqu’un qui passe, que j’aime pas le taiwanais, et qu’il y a du japonais, j’aurais pas peur de rentrer, pis de sortir.

CLC : Ça marche bien ?

Oui, on voit que les gens aiment ça, et retournent plus. C’est sûr qu’on a perdu des anciens clients, des amis qui aimaient, mais on a aussi ajouté le taiwainais en style combo, le soir, qui n’existe pas à Taiwan. Parce qu’à Taiwan, c’est plus souvent le soir, puis on mange ça dans la rue (NDLR: marché nocturne). À Taiwan, ça se mange comme ça (Jason fait un signe en pot, probablement pour dire en plats individuels, format pour emporter), mais nous on met plus de préparation.

CLC : Plus adapté pour une clientèle occidentale, ou des gens moins habitués à la façon taiwanaise ?

Je trouve que c’est une autre génération, je veux dire. Génération nord-américaine. Par exemple, au Japon, des gros makis California, Alaska, il y en avait pas. C’est seulement en Amérique du Nord que ça a commencé, parce que le marché potential demandait telle chose.

CLC : Alors, peux-tu me donner un exemple de plat que tu as adapté ?

Les goûts sont un peu plus sucrés qu’à l’habitude. Il y a plusieurs mets qui viennent avec plus de sauce. Nous autres, on trouve que le poulet juste comme ça c’est très très bon. Mais pour une personne qui n’est pas habituée, elle préférera ça avec une sauce. C’est aussi dans la décoration des plats.

CLC : Donc, comment vous inspirez-vous pour les plats? Est-ce que c’est en grandissant à Taiwan que tu connais ces plats-là, est-ce que c’est à travers ta famille ?

Bien, je suis arrivé à l’âge de 9 ans, mais avant j’ai quand même essayé plusieurs choses. Mais vu que ma mère ne travaillait pas, avant le restaurant, elle cuisinait beaucoup pour nous. En essayant, en pratiquant, c’est devenu très très bon. Elle faisait des snacks, et comment ça a commencé, c’est parce que mes amis aimaient ce que ma mère faisait. Il y avait aussi des raviolis (dumplings), des baozi (pains à la vapeur, ou « buns »), des ngau yok mein (en cantonais, pour dire des nouilles au ragoût de boeuf), et aussi du riz au porc à la taiwanaise.

Alors, il y avait beaucoup de demande parmi les amis. Et vu qu’ils ne voulaient pas toujours juste appeler pour la bouffe de ma mère, on s’est dit, pourquoi pas leur faire un prix, pour pas qu’ils se sentent gênés de demander.

CLC : Ça c’était avant, hein ?

Oui, vers 1998. Nos amis voulaient donc juste payer un montant significatif. Année après année, après 5-6 ans, ma mère s’est bâti une clientèle d’étudiants, comme ici autour d’ici (à Concordia). C’était des amis d’amis d’amis, donc pas de pub. Il y avait des zongzi style taiwanais, surtout la semaine du Tuen Ng festival. Ma mère en faisait environ 600 cette semaine-là!

*** Jason s’exprime en français, mais utilise le cantonais pour me traduire les termes techniques… Le cantonais, bien que seulement parlé comme langue maternelle par ~80 millions des 1,4 milliards de Chinois en Chine, est une langue prédominante dans les communautés outre-mer, pour des raisons historiques. Il m’expliquera un peu plus tard au cours de l’entrevue, pourquoi il parle si bien le cantonais, même si à Taiwan, on parle surtout le mandarin, le taiwanais ou le dialecte chinois hokkien.

CLC : L’aidais-tu ?

Oui! Pour les baozi, il fallait pétrir la pâte 100 fois chaque, et attendre une heure pour que ça lève!

CLC : Toute la famille, vous vous métiez ensemble pour faire de la bouffe…

Oui, ben on trouvait qu’il y avait deux bonnes raisons de travailler là-dessus. D’abord de réunir la famille et faire d’autre chose. Et deuxièmement, d’amener la bonne nourriture, d’apporter le style taiwanais à Montréal. On est allé voir à Toronto, et il n’y en avait pas. Et à New York, je ne pense pas qu’il y en ait.

CLC : Mais tu as les cafés bubble tea (qui sont un concept taiwanais) qui servent bien des plats taiwanais.

Oui, oui, ils servent des mets. Mais moi, je veux dire style fusion, comme ce qu’on a, japonais et taiwanais.

CLC : Donc, toi tu as grandi à Montréal ?

J’ai grandi ici, fait mon secondaire ici, le cégep au Collège Champlain. Après ça, je suis allé travailler. Depuis 15 ans, je travaillais dans les restaurants.

CLC : C’était où ?

La première première job de resto, c’était le McDo! Tout le monde commence par le McDo! À l’âge de 16 ans que c’était. Mais la première job c’était un client de ma mère qui vendait des bonsaïs! Ils vendaient ça dans différents centres commerciaux. Je travaillais dans l’un de ces kiosques, et il y avait deux personnes: le manager et le vice-manager! Donc, à 15 ans j’étais le vice-manager! Et après avoir fini ça, j’ai appliqué au McDo, et là ils ont vu « vice-manager”. Ils m’ont pas crû, facque ils ont appelé, et ils leur ont confirmé ça. Je me rappelle que la première journée après avoir déposé mon CV, ils m’ont rappelé la même journée. Puis, je suis allé les voir, et je commençais la semaine suivante! Woaw, ma première job à 16 ans! J’ai travaillé pour un an, et je pense que je suis devenu « quart de gérant » à 17 ans.

CLC : Puis après le McDo, qu’est-ce que tu as fait ?

Après le McDo, je suis allé au Piment Rouge, l’un des premiers restos à amener la cuisine széchuanaise (sichuanaise) à une autre génération, style …

CLC : Style « français”, nouvelle cuisine ?

Ouais, c’est ça. Puis après ça, je pense que j’ai fait 10-15 restaurants à Montréal. Il y avait aussi le Mr Ma à Place Ville-Marie, et j’ai travaillé là un an. À Piment Rouge j’ai travaillé là trois ans. On a tous commencé comme bus boy, puis on a appris comment ce qu’un restaurant, la cuisine fonctionnaient, et tout ça.

CLC : T’es allé à l’université après ça ?

Oui, je suis allé à McGill, et je faisais le McGill Taiwanese Students’ Association (MTSA). J’ai commencé mon bacc en administration pour un ou deux semestres. Ensuite, j’ai lâché et je suis allé faire mon cours à l’Institut Trebas comme ingénieur en enregistrement de son.

CLC : Eh c’est cool ça. T’as un intérêt en musique – fais-tu de la musique ?

J’écris, mais je joue un peu de guitare, rien de professionel.

CLC : T’as ton band ?

Pas encore… C’est plus difficile de commencer un band asiatique. Y’en a, mais je pense que des membres sont quand même Québécois.

*** Jason me montre leur menu, dont les photos ont été prises par son frère (même chose pour les photos accrochées sur les murs).

La journée qu’on a pris les photos du menu, tout le monde a mangé ce qu’il y avait dessus! Mon frère était retourné à Taiwan après avoir étudié (en design) à Lasalle. Il a travaillé un an pour des compagnies de photographie. En Asie, je ne sais pas ici, il y a beaucoup de studios de photo – pas seulement pour les mariages, mais aussi, comme par exemple pour des photos artistiques. Mon frère travaillait pour l’un des plus gros à Taiwan.

C’est rendu que tous les jeunes ont leurs photos artistiques. C’est une mode à Taiwan. Les gens rentrent, et il y a toute une série de vêtements, maquillage, etc.

CLC : Qu’est-ce que tu penses du quartier ici, autour de Concordia ?

Je trouve qu’on est bien situé parce qu’on est dans un coin résidentiel, et on est pas très loin du quartier des affaires. Mais c’est à cause de ça qu’on a moins de clients le midi que le soir. On est quand même près de Westmount.

CLC : Cette partie de Ste-Catherine était morte il y a quelques années. Il y a vraiment plein de restos qui ont ouvert ces 10 dernières années.

C’est à cause de (la population étudiante) internationale de Concordia. […] Je pense que c’est tout à cause de (l’école d’administration) John Molson (de Concordia). Ils se sont dit, d’où est-ce que l’argent vient? D’outre mer. Les gens outre-mer ont tellement d’argent pour envoyer leurs enfants étudier à l’étranger, alors ils se sont dit qu’ils leur offriraient des cours internationaux pour qu’ils puissent venir et avoir leur visa. C’est ça que je pense…

Puis cette clientèle internationale, ça nous donne tout un défi. On doit essayer toutes sortes de choses, offrir différents goûts pour satisfaire telle ou telle clientèle.

*** Puis on parle de sa satisfaction vis-à-vis l’expérience d’ouvrir leur restaurant, leur premier chef, …

Tout ce qu’on a aujourd’hui, ça a tout commencé à cause de Dieu. Je ne sais pas si t’es chrétien?

CLC : Non. Toi tu l’es ?

Oui, nous on est protestant. Parce qu’on a vécu beaucoup de choses, on peut voir « l’Acte de Dieu ». Cet endroit, avant nous, c’était tous des Chrétiens. Avant, il y avait des Coréens, puis avant, une pizzéria. On est la quatrième génération de protestants, presbytériens.

Une histoire pas rapport, mon père m’a dit une fois que c’était mon grand-père qui a importé les taxis à Taiwan. Parce qu’à l’époque, il n’y avait pas beaucoup de voitures, il est allé au Japon pour importer des taxis, et aussi des appareils radio. Probablement dans les années 40.

CLC : Retournes-tu souvent à Taiwan ?

Ça fait déjà six ans que je ne suis pas retourné. Soit cette année, ou l’année suivante, on va retourner pour voir la famille de ma blonde, et essayer d’autres choses de Taiwan, voir comment adapter ça. Dans cette business, il faut toujours ajouter de nouvelles affaires, et voir qu’est-ce que les personnes aiment.

CLC : T’as déjà eu des vedettes à ton restaurant ?

(long moment de réflexion) Je pense qu’il y a eu un joueur des Sénateurs d’Ottawa. Mais je ne me souviens pas de son nom!

CLC : Es-tu un fan de hockey ?

Ouais, un fan des Canadiens. Cette année, ils sont tellement forts, comparé aux autres années. Ils sont cinquième de tout le classement (NDLR: en fait, ils sont quatrième dans l’est, ou du classement général, si on regarde ce soir). J’sais pas pourquoi ils ont perdu le match l’autre soir contre les Capitals (de Washington).

*** Pis Forsberg? Non, ça fait deux, trois qu’il essaie de revenir, puis c’était pas concluant… Je lui apprends que les pauvres Kings sont dans la cave, suivi du Lightning et des Maple Leafs…

CLC : J’ai vu que tu faisais de la pub sur Facebook? Est-ce que ça marche ?

Oui, parce que c’est quelque chose de persistant. C’est quelque chose qui est là, et quand j’ai envie de sortir manger, je me souviens d’avoir vu quelque chose noir/rouge (le logo de Lu Mama est de cette couleur). Ça fonctionne, et maintenant on a 360-370 personnes. Je pense qu’on va faire un event Facebook quand ça va dépasser 400! Nouvel An chinois, on fera un spécial hot pot (fondue chinoise).

CLC : Vous avez des hot pot ici ?

Oui, oui. C’est des hot pot individuels. On a enlevé ça durant l’été. Chaud l’été, ça marche à Taiwan, parce qu’il y a une habitude. Ici, chaud et chaud, hmm. Et à cause de ça, le sushi, ça marche bien l’été. C’est pour ça qu’on change notre menu à chaque deux saisons.

CLC : Beaucoup de mets taiwanais sont aussi japonais. À cause de la colonisation ?

À cause de la colonisation, mais aussi les mets taiwanais sont une évolution de mets venant de différents endroits. Donc, les mets de Taiwan viennent de Fokkien (Fujian – province de Chine continentale en face de Taiwan). Nous, on est Taiwanais de là.

CLC : Comment ça se fait que tu parles cantonais ?

L’année que je suis venu, c’était en 1990, alors j’ai fait la classe d’accueil et 20 sur 30 des élèves étaient de Hong Kong, à cause de 1997 (NDLR: année de la rétrocession du territoire). C’est donc à cause de ça que tous mes amis étaient des Cantonais.

CLC : As-tu gardé ces amis-là ?

Oui, c’est tous des amis avec qui j’ai gardé contact, mais je trouve que beaucoup sont partis après les études, après l’université. Il doit y avoir 20% qui sont encore ici.

CLC : Pourquoi est-ce qu’ils sont partis ?

Parce qu’ils sont chinois, ils aimeraient ça retourner. Tous les jeunes, moi y compris, on pense que le Canada c’est une place qui est très bonne pour après (la retraite), parce que c’est le rhythme de vie est très lent. Ici, c’est comme lundi … mardi … mercredi. En Asie, c’est genre, oh… vendredi déjà? Je pense que c’est pour ça que beaucoup de gens partent pour essayer la vie en Asie. En même temps, ils veulent se donner un défi pour eux-mêmes. Tout le monde dit qu’en Asie, si tu veux te trouver une job, faut que tu sois tough, etc.

CLC : Eux, ils parlent couramment chinois ?

Pas couramment, comparé aux gens en Asie. Normalement, ceux qui retournent travaillent tous pour des compagnies américaines. Alors, quand ils ont besoin de parler, c’est plus pour le social. S’ils allaient travailler en Asie pour une compagnie de là-bas, je ne pense pas qu’ils rentreraient. Ça serait beaucoup plus exigeant.

CLC : Ton chinois à toi, il est bon ?

Parlé, ok là. Je peux écrire, comme 10%, lire 70%, parler 60-70%. Pour écrire, t’as vraiment de place pour pratiquer, mais taper sur l’ordinateur, c’est autre chose (NDLR: l’une des méthodes d’entrée populaires en chinois se base sur la romanisation pinyin).

CLC : Qui es-tu ?

Je suis un Taiwanais qui vit ici depuis l’âge de 9 ans. Mais je me trouve ben Québécois, parce qu’on est ici depuis longtemps… Je suis un learner. Même pour mon âge, être entrepreneur c’est trop tôt. Le mot entrepreneur ne me décrit pas vraiment bien. Je dirais plus que je suis encore un étudiant en cours d’apprentissage.

CLC : Merci Jason!

Merci!

Lu Mama: 1858, rue Ste-Catherine Ouest, 514-582-2222.

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